Acheronta  - Revista de Psicoanálisis y Cultura
Anexe 2: La compacité
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Que Jean-Michel Vappereau soit ici remercié pour ses explications patientes sans lesquelles nous n’aurions pu rédiger cet article.

«Le développement systématique de la topologie ne date que d’un siècle (recherches de H. Poincaré 1854-1912 et de L. E. J. Brouwer [1881-1966]). L’origine du terme vient de J. B. Listing (1808-1872), qui l’utilise en 1831 pour remplacer le terme analysis situs forgé par Leibniz (1646-1716) en 1679 (1)».

La topologie est la partie des mathématiques qui étudie la notion, à priori intuitive, de continuité et de limite. Ainsi l’intuition nous apprend que parmi les trois figures suivantes nous pourrions déformer continûment les deux premières l’une dans l’autre, mais aucune d’entre elles ne peut être déformée dans la troisième.

La topologie s’intéresse donc à l’espace, tout comme la géométrie, mais elle n’a pas forcément comme elle de préoccupations métriques. Pour la topologie l’espace n’a pas besoin d’être mesurable, il lui suffit qu’elle y trouve un ordre. La topologie est classiquement divisée en trois secteurs, topologie générale, topologie algébrique et topologie différentielle.

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La compacité, à laquelle Lacan fait référence dans cette séance est une notion de topologie générale laquelle, dans le prolongement des notions de limite et de continuité, étudie principalement les espaces compacts et les espaces connexes.

La compacité peut se définir de plusieurs façons dont on démontre l’équivalence. Lacan fait ici référence à la définition la plus usuelle qui se formule en terme d’espaces ouverts, ainsi qu’à une définition en terme d’espaces fermés qu’il présente comme complémentaire de la première.

Intuitivement on peut dire qu’un espace est ouvert ou fermé suivant qu’il contient ou non ses limites. Ainsi sur la droite réelle R l’espace fermé [ 0, 1 ] comprend les points 0 et 1, alors que l’espace ouvert ] 0, 1 [ ne les comprend pas.

Ajoutons que, dans un espace de référence donné, le complémentaire d’un espace ouvert est un espace fermé. Dans l’espace E, le complémentaire de l’espace A est l’ensemble des éléments de E qui n’ appartient pas à A. Une de ses notations est A. Une représentation courante d’un ensemble et son complémentaire est le diagramme de Carroll :

Un exemple sur la droite : sur l’intervalle semi-ouvert ] 3, 8 ] le complémentaire de l’espace ouvert ] 3, 6 [ est l’espace fermé [ 6, 8 ].

DÉFINITION dite : en terme d’ouvert on dit d’un espace topologique qu’il est compact si de tous les recouvrements ouverts de celui-ci (y compris donc les recouvrements infinis) on p eut extraire un sous-recouvrement fini.

Lacan donne cette définition in extenso : « … l’ensemble de ces espaces ouverts s’offre toujours à un sous recouvrement d’espaces ouverts, eux tous constituant une finitude, à savoir que la suite des dits éléments constitue une suite finie (2)».

Il faut entendre recouvrement dans son sens commun, tout comme on dit que des tuiles recouvrent un toit, si deux d’entre elles ne se chevauchent pas correctement le toit n’est pas recouvert. Des tuiles sur un toit donnent l’image d’un recouvrement du plan R2. Dans l’espace euclidien R3 le recouvrement pourra être assuré par des sphères. Dans un espace supérieur à 3 on parlera de recouvrement par des hyper-sphères.

Nous nous situerons plus simplement, comme Lacan le fait implicitement dans cette séance (3), dans le cadre de la topologie de la droite numérique réelle R, ainsi nommée parce que l’on fait correspondre à chaque point de la droite un nombre réel unique.

Sur cette droite le recouvrement de l’intervalle fermé [ 0, 1 ] pourra, par exemple, être assuré par les intervalles suivants :

1) Une suite infinie de type ] 1/n, 1 ] où n est un nombre entier naturel N supérieur à 1.

] 1/2, 1 ] ; ] 1/3, 1 ] ; ] 1/4, 1 ] ;......... ; ] 1/n, 1 ]

2) Un intervalle [ 0, S [ où S est un nombre compris entre 0 et 1.

Plus brièvement ce recouvrement peut s’écrire  :

G = { ] 1/n, 1 ] , [ 0, [ : où 0 < S < 1 et n N, avec n > 1 }

et s’imager ainsi  :

où l’on voit que le recouvrement de l’espace [ 0, 1 ] est effectif dès que 1/n < S.

Le lecteur attentif aura remarqué que la définition de la compacité parle de recouvrir un espace fermé avec des espaces ouverts. Or, si l’espace à recouvrir [ 0, 1 ] lui apparaît bien comme fermé, que dire des espaces recouvrants ] 1/n, 1 ] et [ 0, S [ notés comme ouverts d’un côté et fermés de l’autre  ?

Il faut, ici, demander à ce lecteur de mettre de côté la représentation intuitive qu’il a des ouverts et des fermés qui prend appui sur l’écriture avec les crochets ( [ ] ; ] [ ), pour faire un usage des termes d’ouverts et de fermés en accord avec la définition d’une topologie. Rappelons que l’expression « une topologie » est communément synonyme de "structure topologique".

Une topologie T sur un ensemble non vide X se définit généralement par un ensemble de parties ouvertes de X (c’est-à-dire de sous-ensembles ouverts de X).

On dit que T est une topologie sur X si cet ensemble vérifie les axiomes suivants :

– O1 l’ensemble X et l’ensemble vide sont des ouverts qui appartiennent à T

– O2 la réunion, d’autant qu’on veut, de parties ouvertes de T est une partie ouverte de T.

– O3 l’intersection d’un nombre fini de parties ouvertes de T est une partie ouverte de T.

Puisqu’une topologie est définie par des axiomes, ici 01, 02 et 03, déterminer si les intervalles ] 1/n, 1 ], [ 0, S [ voire même [ 0, 1 ] sont des ouverts ou des fermés ne devient pertinent qu’après s’être demandé, d’abord, par rapport à quel espace de référence, et avoir vérifié, ensuite, qu’ils répondent aux trois axiomes 01, 02, et O3.

Prenons l’exemple de l’ensemble X = {a, b, c, d, e} et des familles suivantes de parties de X :

T1 = {X, ø, {a}, {c, d}, {a, c, d}, {b, c, d, e}}

T2 = {X, ø, {a}, {c, d}, {a, c, d}, {b, c, d}}

T3 = {X, ø, {a}, {c, d}, {a, c, d}, {a, b, d, e}}

Les ensembles T1, T2 et T3 sont-ils des topologies sur X ?

– T1 est une topologie sur X puisqu’il vérifie les trois axiomes O1, O2 et O3.

– T2 n’est pas une topologie sur X puisque la réunion des deux éléments suivants de T2, {a, c, d} {b, c, d} est égale à {a, b, c, d} et que cet élément n’appartient pas à T2, du coup T2 ne vérifie pas l’axiome O2.

– De même T3 n’est pas une topologie puisque l’intersection des deux éléments suivants de T3, {a, c, d} {a, b, d, e} est égale à {a, d} et que cet élément n’appartient pas à T3, c’est-à-dire que T3 ne vérifie pas l’axiome O3.

En suivant cette démarche il apparaît que les espaces ] 1/n, 1 ], [ 0, S [, et même [ 0, 1 ], sont des ouverts de l’espace de référence fermé [ 0, 1 ]. Pour comprendre cela il faut juste encore préciser la notion de topologie induite.

Reprenons d’abord l’exemple de l’ensemble X muni de la topologie T1, donné ci-dessus. Soit l’ensemble X = { a, b, c, d, e }, et l ’ensemble des ouverts de X que nous avons appelé sa topologie, soit :

T1 = { X, ø, { a }, { c, d }, { a, c, d }, { b, c, d, e } }

Nous avons montré que T1 est une topologie car elle vérifie les axiomes 01, 02, et 03.

Considérons maintenant le sous-ensemble A = { a, d, e } de X. Et bien, les intersections des ouverts de X, soit T1, avec A forment l’ensemble des ouverts de A. Nous noterons cet ensemble TA et nous l’appellerons la topologie induite par X sur A.

Les intersections des ouverts de X avec A sont :

La topologie induite par les ouverts de X sur A est donc :

TA = { A, ø, { a } , { d } , { a, d } , { d, e } }

Il est aisé de vérifier que l’ensemble TA est en accord avec les axiomes 01, 02, et 03, et qu’ il est donc une topologie sur A.

En ce qui concerne l’exemple que nous avons pris sur l’ espace [ 0, 1 ] pour illustrer la notion de compacité, (cf. plus haut p.3) la topologie qui va nous intéresser est la topologie induite par la droite R sur l’espace [ 0, 1 ].

Rappelons que la topologie usuelle sur la droite R est définie, comme l’est généralement toute topologie, par la connaissance de ses ouverts. Notons ] x, y [ ces ouverts.

L’espace fermé [ 0, 1 ] est une partie de R qui aura avec ces ouverts ] x, y [ un certain nombre d’intersections. Et bien, les intersections de [ 0, 1 ] avec les ouverts ] x, y [ de R déterminent une topologie sur [ 0, 1 ] dont les ouverts sont précisément ces intersections. C’est la topologie induite sur [ 0, 1 ] par la topologie de R.

Voici 5 exemples d’intersections possibles entre un ouvert ] x, y [ de R et [ 0, 1 ]. Les intersections sont représentées en hachurées :

 

Il existe bien d’autres intersections des ouverts de R avec [ 0,1 ]. Par exemple celles engendrées par plusieurs ouverts de R, ] x, y [ et ] x’, y’ [.

Il existe une infinitude d’autres intersections des ouverts ] x, y [ de R avec [ 0, 1 ]. Imaginez que l’on prenne en compte des ouverts ] x « , y » [ et ] x’’’, y’’’ [, etc.. ainsi que toutes les réunions et intersections que ces ouverts ont entre eux sur l’espace [ 0, 1 ]. On pourrait cependant dresser une liste finie d’un certain nombre de types d’intersections dont, entre autres, les 7 types ci-dessus.

Toutes ces intersections sont, conformément à la définition d’une topologie induite, des ouverts de l’espace de référence [ 0, 1 ]. Le lecteur qui dresserait la liste des différents types d’intersections possibles, pourrait vérifier que l’ensemble qu’elles constituent est une topologie sur l’espace [ 0, 1 ] car cet ensemble vérifie les trois axiomes 01, 02 et 03. Cette topologie s’écrit :

On voit donc qu’à partir du moment où l’on a définit une topologie par des axiomes, on ne peut plus faire un usage approximatif des termes d’ouverts et de fermés. Il faut d’abord définir l’espace de référence, et l’on s’aperçoit alors qu’un ensemble peut être ouvert relativement à un sous-espace mais ni ouvert, ni fermé dans l’espace tout entier. C’est, par exemple, le cas des intervalles de type ] 1/n, 1 ] ou bien [ 0, 1/n [ qui sont des ouverts de la topologie induite par R sur [ 0, 1 ] mais qui ne sont ni ouverts, ni fermés par rapport à R tout entier. Un espace peut même être un fermé de l’espace tout entier et être un ouvert de l’espace de référence. C’est le cas de [ 0, 1 ] qui est un fermé de R tout entier mais qui est un ouvert de la topologie induite par R, au motif qu’il vérifie avec les autres ouverts induits par R sur [ 0, 1 ] les axiomes 01, 02 et 03.

Avant ces indispensables précisions sur la notion de topologie induite, nous disions que le recouvrement de l’espace [ 0, 1 ] était assuré par l’ensemble des ouverts notés  :

G = { ] 1/n, 1 ] , [ 0, S [ : où 0 < S < 1 et n N, avec n > 1 }

Ce recouvrement est infini puisque la suite ] 1/n, 1 ] est infini. Quand n tend vers l’infini, 1/n tend vers 0 sans jamais l’atteindre et le recouvrement n’est possible qu’à adjoindre à cette suite infinie l’espace [ 0, S [. (Voir le schéma ici p. 3 ).

De ce recouvrement infini G on voit que l’on peut extraire un sous recouvrement fini dès que 1/n < S. Aussi petit que soit S il y aura toujours un 1/n plus petit.

Si par exemple S = 1/10 000 on pourra extraire du recouvrement infini G le sous-recouvrement fini G’ :

G’ = { ] 1/2, 1 ] ,......., ] 1/10 001, 1 ] , [ 0, 1/10 000 [ }

Nous venons donc de montrer que sur l’intervalle fermé [ 0, 1 ] l’on pouvait extraire un sous-recouvrement fini d’un recouvrement infini. Si on peut procéder à cette extraction à partir de n’importe quel recouvrement infini, on aura démontré que l’intervalle [ 0, 1 ] est compact. On démontre effectivement (théorème de Heine-Borel) que sur un intervalle fermé et borné quelconque de la topologie usuelle de R on peut toujours extraire un sous-recouvrement fini d’un recouvrement infini. Tout intervalle fermé et borné est donc compact.

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Afin de mieux cerner cette notion de compacité considérons l’exemple, a contrario, d’un espace non compact : l’espace ouvert ] 0,1 [. On constate que celui-ci peut bien faire l’objet d’un recouvrement infini par la suite des intervalles ouverts 

] 1/n, 1 [, mais on voit aussi que de ce recouvrement infini on ne pourra jamais extraire de sous-recouvrement fini. Tout le problème réside dans le fait que tous les points S compris entre 0 et 1 ne peuvent être recouverts d’une manière finie. En effet, on pourra toujours, dans le cas présent, produire un point S plus petit que le point 1/n faute de disposer, comme précédemment, ( cas du fermé [ 0, 1 ] ) du point 0, limite de la suite 1/n.

Comme on ne peut procéder à l’extraction d’un sous-recouvrement fini à partir d’un recouvrement infini, on peut donc conclure que l’espace ouvert ] 0, 1 [ n’est pas compact.

On saisit, avec cet exemple d’un intervalle non compact, en quoi les notions de limite et de compacité sont très proches. Aller dans le sens de la compactification d’un intervalle dans lequel une suite converge vers un point limite x qui lui est extérieur consiste à lui adjoindre ce point limite x.

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Il y a, disions-nous au début de cet article, plusieurs façons de définir la compacité. Nous avons donné la définition en terme d’espaces ouverts, il en est une autre qui se formule en terme d’espaces fermés.

Nous avons dit ici, p. 2, que dans un espace de référence donné, le complémentaire d’un espace ouvert est un espace fermé. Que le lecteur se rapporte aux schémas que nous avons donnés pour illustrer la topologie induite par les ouverts ] x, y [ de R sur [ 0, 1 ], il établira facilement la liste des fermés complémentaires.

De même que l’ensemble des ouverts de l’espace [ 0, 1 ] devait répondre aux axiomes 01, 02, 03 pour former la topologie T [0,1], l’ensemble des fermés de cet espace doit répondre à des axiomes F1, F2, F3 pour former la topologie T [F,1]’.

En effet, en terme de fermés une topologie, TF, sur un ensemble non vide X peut se définir par un ensemble de parties fermés de X (c’est à dire de sous-ensemble fermés de X) qui vérifient les trois axiomes suivants :

F1 : l’ensemble X et l’ensemble vide sont des fermés qui appartiennent à TF.

F2 : l’intersection, d’autant qu’on veut de parties fermées de TF est une partie fermée de TF.

F3 : la réunion d’un nombre fini de parties fermées de TF est une partie fermée de TF.

La topologie induite par les fermés de R sur l’espace [ 0, 1 ] s’écrit :

Le lecteur qui dresserait la liste exhaustive de ces fermés pourrait vérifier qu’elle est en accord avec les axiomes F1, F2, F3.

On peut donc définir la compacité en terme de fermés :

DÉFINITION dite : de toute famille de fermés (les familles infinies incluses) d’un espace considéré X dont l’intersection est vide on peut extraire une sous-famille finie dont l’intersection est vide.

Cette définition est équivalente à celle en terme d’ouverts, elle lui est complémentaire.

Reprenons l’exemple que nous avons employé ici page 3 sur l’espace [ 0, 1 ] pour illustrer la notion de compacité, mais donnons-en la formulation en terme de fermés. Nous avons alors deux types d’intervalles fermés, complémentaires des intervalles ouverts précédemment utilisés.

Les intervalles ouverts étaient :

[ 0, S [ et ] 1/n, 1 ] .

Leurs complémentaires fermés seront :

[ S, 1 ] et [ 0, 1/n ] .

L’ensemble de ces fermés peut se noter  :

G F = { [ 0, 1/n ] , [ S, 1 ] où 0 < S < 1 et n N }

et se dessiner ainsi :

En terme d’ouverts l’enjeu était de vérifier que l’espace [ 0, 1 ] était bien recouvert par l’ensemble G des espaces ouverts. En terme de fermés l’enjeu sera, au contraire, de vérifier que l’ensemble GF des espaces fermés n’assure pas ce recouvrement, c’est à dire que l’intersection de tous ces espaces est vide.

 

 

 

Si on considère, par exemple, la famille infinie de fermés,

GF’ = { [ 0, 1/3 ] , [ 0, 1/4 ] ,......., [ 0, 1/n ] , [ 1/2, 1 ] :

où n -> }

on voit que l’intersection de toutes ses parties est vide et qu’on peut en extraire une sous-famille finie, par exemple :

GF « = { [ 0, 1/3 ] , [ 0, 1/4 ] , [ 1/2, 1 ] }

dont l’intersection des trois éléments qui la compose est vide.

Dans cet exemple l’intersection est vide dès que 1/n < S.

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Dans cette séance, Lacan commence par donner une définition en terme de fermés qu’il présente un peu plus bas comme complémentaire de celle en terme d’ouverts (voir «  ...le complément de cette hypothèse de compacité » (transcription p.10), la voici :

«Rien de plus compact qu’une faille s’il est bien clair que quelque part, il est donné que l’intersection de tout ce qui s’y ferme étant admise comme existante en un nombre fini d’ensemble, il en résulte, c’est une hypothèse, que l’intersection existe en un nombre infini. Ceci est la définition même de la compacité » (transcription p.10).

Une lecture attentive de cette définition un peu obscure montre que, s’il s’agit bien d’une définition en terme de fermés (voir « … l’intersection de tout ce qui s’y ferme»), mais il ne s’agit pas de celle complémentaire de la définition en terme d’ouverts. Il s’agit d’une autre définition en terme de fermés, très exactement celle-ci :

DÉFINITION dite F’ : Si l’intersection de toute sous-famille finie d’une famille d’un espace X est non-vide alors toute famille (y compris donc les familles infinies) est elle-même non vide.

Nous avons appelé :

0 la définition en terme d’ouvert.

F la définition en terme de fermés de la page 9.

F’ la définition en terme de fermés que nous venons de donner.

Ces trois définitions équivalentes sont articulées les unes aux autres par les liens logiques suivants :

La contraposition est un terme de logique. La contraposée de P => Q (qui se lit « P implique Q » ou encore « si P alors Q ») est (non Q) => (non P). Par exemple, l’énoncé contraposé de « si n est multiple de 6 alors n est pair » est l’énoncé « si n est impair alors n n’ est pas multiple de 6".

Nous soutenons que Lacan nous donne F’, car :

– Parler de « l’intersection de tout se qui s’y ferme…  » évoque une suite qui s’accumule en un point pour faire intersection et qu’il est donc implicitement question d’une intersection non vide, ce qui correspond à la définition F’, et est à l’opposé de la définition F où il n’est question que d’intersection vide.

– D’autre part, la présentation à deux reprises par Lacan de l’intersection comme passant du fini à l’infini est cohérente avec la définition F ’. Dans F l’hypothèse (ou la prémisse) porte sur un nombre infini de fermés, et la conclusion sur l’extraction d’une sous-famille finie, alors que dans F’, on a bien ce passage du fini à l’infini, l’hypothèse porte effectivement sur une sous-famille finie et la conclusion sur une famille infinie.

Si Lacan donne F’ comme première définition de la compacité, c’est probablement pour le caractère séduisant qu’il y a à tirer des conclusions sur l’infini à partir du fini. On part en effet d’un ensemble fini, dont on peut donc faire le tour, pour en tirer des conclusions sur un ensemble infini.

Pourtant le point fort de cette leçon du séminaire s’articule autour de la possibilité de pouvoir extraire du fini à partir de ce qui se présente comme infini.

La jouissance de l’Autre côté, pour reprendre les termes de Lacan, c’est à dire la jouissance qui n’est pas du côté phallique, est prise comme un espace sur lequel se déploie une suite infinie mais dont on peut, parce que cet espace est borné fermé, donc compact, extraire du fini, du un par un, ou plutôt, puisqu’il s’agit de la jouissance de l’Autre côté, du une par une. Si cet espace était ouvert, et donc non compact, on ne pourrait dégager du un de l’infini, c’est ce qui se passe du côté de l’être dit Lacan. ("Là où est l’être c’ est l’exigence de l’infinitude". Transcription p. 12).

Il vaut de noter que la transcription de J. A. Miller rend illisible cette question de la compacité, point d’orgue de cette première séance, notamment parce que, l’opposition fini/infini de la définition en terme de fermés y est complément évacuée. Une première fois il est dit que « l’intersection de tout ce qui s’y ferme étant admise comme existante sur un nombre infini d’ensemble il en résulte que l’intersection implique ce nombre infini. Ceci est la définition même de la compacité 4». Transcription à comparer avec celle que nous avons donné ici-même page 10. Une seconde fois, quelques lignes plus bas, quand il est question de « … l’intersection s’étendant à l’infini » au lieu de « … l’intersection passant du fini à l’infini », (transcription p.11).

Le lecteur n’a, dès lors, quasiment aucune chance d’aborder correctement une question dont on ne peut dire qu’elle soit facile.

A celui qui voudrait en savoir plus nous conseillons un livre de topologie générale : Topologie, cours et problèmes, Seymour Lipschutz, Série Schaum, Ed. Mc Graw Hill. Nous conseillons également l’ouvrage à paraître de Jean-Michel Vappereau, Nons, la topologie du sujet Ed. Topologie en extension.

Notes

1 R.Thom, Paraboles et catastrophes, Coll. Champs, Ed. Flammarion. Paris 1983, note 1, p.161.

2 Voir transcription p.11

3 Voir tout le passage où Lacan fait référence à l’exemple de Zénon, Achille et la tortue, qui se situe sur une droite, transcription p. 9.

4 J. Lacan, Encore, Livre XX, Ed. Seuil, Paris 1975, p.14.

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Revista de Psicoanálisis y Cultura
Número 13 - Julio 2001
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