Acheronta  - Revista de Psicoanálisis y Cultura
Anexe 7: Pierre Rousselot S.J.
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C’est dans la thèse qu’il passe en 1908 à La Sorbonne intitulée Pour l’histoire du problème de l’amour au Moyen-Âge que P. Roussel ot développe la distinction entre la conception physique et la conception extatique de l’amour.

«Deux conceptions de l’amour se partagent les esprits au moyen-âge ; on peut les appeler la conception physique et la conception extatique. Physique, cela va de soi, ne signifie pas ici corporel : les partisans les plus décidés de cette manière de voir ne regardent l’amour sensible que comme un reflet, une faible image de l’amour spirituel. Physique signifie naturel, et sert ici à désigner la doctrine de ceux qui fondent tous les amours réels ou possibles sur la nécessaire propension qu’ont les êtres de la nature à rechercher leur propre bien. Pour ces auteurs, il y a entre l’amour de Dieu et l’amour de soi une identité foncière, quoique secrète, qui en fait la double expression d’un même appétit, le plus profond et le plus naturel de tous, ou pour mieux dire, le seul naturel. Cette manière de voir est celle, par exemple, de Hugues de Saint Victor dans son traité Sacramentis ; c’est celle de Saint Bernard dans le Diligendo Deo ; elle trouve un appui très ferme dans les théories néoplatoniciennes de Pseudo-Denys. Elle fut, enfin, précisée et systématisée par Saint Thomas qui, s’inspirant d’Aristote, en dégage le principe fondamental en montrant que l’unité (plutôt que l’individualité) est la raison d’être, la mesure et l’idéal de l’amour ; il rétablit, du même coup, la continuité parfaite entre l’amour de convoitise et l’amour d’amitié. La conception physique pourrait encore s’appeler la conception gréco-thomiste.

La conception extatique, au contraire, est d’autant plus accusée chez un auteur, qu’il prend plus de soin de couper toutes les attaches qui semblent unir l’amour d’autrui aux inclinations égoïstes : l’amour, pour les tenants de cette école, est d’autant plus parfait, d’autant plus amour, qu’il met complètement le sujet « hors de lui-même». Il s’ensuit que l’amour parfait et vraiment digne de ce nom requiert une réelle dualité de termes : le type du véritable amour n’est plus, comme pour les auteurs précédents, celui que tout être de la nature se porte nécessairement à lui-même. L’amour est tout à la fois extrêmement violent et extrêmement libre : libre, parce qu’on ne saurait lui trouver d ’autre raison que lui-même, indépendant qu’il est des appétits naturels ; violent parce qu’il va à l’encontre de ces appétits, qu’il les tyrannise, qu’il semble ne pouvoir être assouvi que par la destruction du sujet qui aime, par son absorption dans l’objet aimé. Étant tel, il n’a pas d’autre but que lui même, on lui sacrifie tout dans l’homme, jusqu’au bonheur et jusqu’à la raison. La conception extatique de l’amour a été exposée avec infiniment d’art, de ferveur et de subtilité par quelques-uns de ces mystiques éperdument dialecticiens qui sont les figures les plus originales du XIIème siècle ; on la rencontre chez Saint-Victor, dans l’ordre de Citeaux, dans l’école d ’Abelard, et les traces en sont reconnaissables dans la scolastique des Franciscains».

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Revista de Psicoanálisis y Cultura
Número 13 - Julio 2001
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